Tour d’horizon sur le financement participatif (« crowdfunding »)

Le financement participatif est en pleine croissance avec plus de 336 millions d’euros collectés en 2017, soit une augmentation de 44% par rapport à 2016 (234 millions d’euros). Cet article fait un état des lieux des différentes formes de financement participatif. L'approche plus critique de ces modes de financement fera l'objet d'un article séparé.

I)    Les différents types de financement participatif 

Il y a aujourd’hui trois formes de financement participatif :

  • Le don avec ou sans contrepartie. Cela représente un total de 82.8 millions d’euros en 2017.
  • Le prêt rémunéré ou non rémunéré ("crowdlending"). 195,4 millions d’euros ont été collectés grâce au prêt et en majorité par émissions d’obligations (115,8 millions).
  • L’investissement en capital ("crowdequity"). Seulement 58 millions d’euros ont été collectés par le biais de l’investissement en capital (recul de 15% par rapport à 2016 où 68.6 millions d’euros avaient été collecté par ce biais).

Le don représente 24,64% du marché du financement participatif. Le don peut être avec ou sans contrepartie. Le don sans contrepartie s’adresse à des personnes qui soutiennent un projet créatif ou une action philanthropique. En revanche, le don avec contrepartie permet aux financeurs du projet d’obtenir une récompense comme l’accès à un produit non encore commercialisé ou un service. Le don avec contrepartie est majoritaire puisqu’il représente 68,1 millions d’euros collectés contre 14,7 pour le don sans contrepartie.

Aucune règlementation spécifique n’a été définie pour les plateformes de dons. Cependant, ces dernières peuvent opter pour le statut Intermédiaire en Financement Participatif (IFP) (L 548-2 II du Code monétaire et financier).

Les deux autres types de financement participatif retiendront plus particulièrement notre attention.

A) L’investissement en capital : 17,26% du marché du financement participatif

Les investisseurs vont apporter des fonds à une société en passant par une plateforme de « crowdfunding » et recevoir des titres de la société, devenant ainsi associés de la société. Depuis le décret n°2016-1453 du 28 octobre 2016, les SA et SAS peuvent recourir à une offre dont le montant total, calculé sur une période de 12 mois, peut aller jusqu’à 2,5 millions d’euros.

Il est en revanche interdit d’offrir des titres admis sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation.

Ce mode de financement ne pose pas de limitations quant à la nature des investisseurs. Il n’existe pas non plus de limitations quant au montant que peuvent investir les personnes, contrairement au financement participatif sous forme de prêt.

Tous les 12 mois, une société peut donc faire une nouvelle offre de titres dont le montant peut aller jusqu’à 2,5 millions d’euros.

L’article D 411-2 du Code monétaire et financier prévoit néanmoins que « Les offres excédant le montant d'un million d'euros ne peuvent pas porter sur des titres de capital qui représentent plus de 50 % du capital de l'émetteur. Cette limite de 50 % ne s'applique pas à l'offre d'un émetteur ayant pour objet de détenir et de gérer des participations dans une autre société, lorsque ces participations n'excèdent pas 50 % du capital de celle-ci ».

La société qui procède, à partir d’une plate-forme de financement participatif, à une offre de moins de 2,5 million d’euros est exemptée d’établir un prospectus visé par l’Autorité des marchés financiers. Le règlement général de l’AMF est néanmoins venu précis le contenu de l’information à fournir par la société.

Ce mode de financement présente un certain nombre de risques notamment de dilution dans le capital et de paralysie de gestion qui, s’ils ne sont pas traités correctement en amont dans le cadre des statuts et d’un pacte d’actionnaires adaptés, peuvent être source de difficultés et complexité par la suite.

De plus la revente des titres est incertaine et ne peut être garantie pour l’investisseur (risque de non liquidité). Cela peut expliquer le prêt soit davantage plébiscité dans la mesure où il offre plus de sécurité, notamment avec les mini bons qui permettent au souscripteur de se faire rembourser le montant du capital prêté, augmenté des intérêts, à échéance inférieure à un semestre. 

B) Le prêt : 58,15% du marché du financement participatif

L’ordonnance du 30 mai 2014 a mis fin au monopole bancaire en matière de prêts. Les particuliers peuvent désormais prêter à d’autres particuliers ou entreprises sous certaines conditions. Le prêt rémunéré ne peut excéder 2000€ par prêteur et par projet sur une durée maximum de 7 ans. Pour un prêt sans intérêt le seuil est à 5000€. Au total, un porteur de projet ne peut emprunter plus de 2,5 millions d’euros par projet. Le taux d’intérêt est fixé contractuellement sur la durée du prêt et ne peut excéder le taux d’usure.  

Le prêt est la catégorie qui génère le plus de financement participatif en passant de 96,6 millions d’euros collectés en 2016 à 195,4 millions d’euros collectés en 2017 (+102%).

Cette catégorie se subdivise entre :

  • Le prêt non rémunéré (2,8 millions d’euros)
  • Le prêt rémunéré (66 millions d’euros)
  • Le prêt en mini bons (10,8 millions d’euros)
  • Les obligations (115,8 millions d’euros). 

II)   Les plateformes de financement participatif

Afin d’être en mesure de proposer un service de « crowdfunding », la plateforme doit adopter un statut particulier selon ce qu’elle propose :

  • Le conseiller en investissement participatif (CIP) peut proposer des financements sous la forme d’une souscription de titres financiers ou de mini bons. Il doit respecter des règles de conduites et sont soumis au pouvoir de sanction de l’AMF. Il doit adhérer à une association professionnelle agréée par l’AMF. Il n’y a pas besoin d’obtenir un agrément délivré par l’ACPR.
  • Le prestataire de services d’investissement (PSI) propose la même chose que le CIP.
  • L’intermédiaire en financement participatif (IFP) peut proposer de participer au financement d’un projet sous la forme d’un prêt. Son statut est régulé par l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR).

Ces plateformes sont débitrices de tout un processus informatif visant à permettre au financeur de projet de faire un choix éclairé.

NB : Le code de la consommation étant applicable, les financeurs de projet sont déjà protégés contre les clauses abusives sans qu’il y ait lieu de faire valoir l’article 1171 du code civil relatif au déséquilibre significatif dans les contrats d’adhésion.

 

Article rédigé par:

Dominique Dumas, Avocat associé

Courtois Lebel, 13 Ter Bd Berthier, 75017 Paris